Vous avez la matière, nous avons la méthode.

« C'était la première fois que je voyais la neige. À Valberg, je crois. Ou bien Auron ? J'ai un doute. Bref, dans l'arrière-pays niçois. Je ne me rappelle pas le détail de la journée. Pas même du moment où j'ai posé devant l'appareil de mon père. Ce court séjour ne m'a laissé que deux souvenirs nets. D'abord, une impression désagréable causée par la neige qui à un moment s'est glissée entre mes moufles et mon manteau. L'effet saisissant de l'eau glacée qui coule jusqu'à mon coude. Ensuite, la tristesse de devoir rentrer à la maison, le soir, alors que j'étais tombée amoureuse des paysages blancs. Aujourd'hui, je ne porte plus la frange, mais je parie que j'affiche la même bouille heureuse chaque fois que je vois la neige. »

« On entend parfois que l’argent est le nerf de la guerre. C’est aussi celui de l’aventure… Pour boucler le budget, il faut se vendre. Pour se vendre, il faut s’exposer. Ne pas truquer. Soigner les dossiers. Assumer qui l’on est. Chercher, solliciter, séduire. Et ne pas trop jouer de malchance. Pas de sponsor, pas de bateau. Pas de bateau, pas de Vendée Globe. Pas de Vendée Globe... Pas de Vendée Globe ! Mais quand on a fait que la Mini Transat, on n'est personne dans la course au large. Comment être crédible auprès de potentiels partenaires, suciter l'engouement et boucler mon budget ? Pendant un an, je n'ai pas vu le jour ! Je suis entré dans ma phase d''hibernation, comme je la nomme, et j'ai remué ciel et terre ! »

« Je n’ai aucune photo de la maison où j’ai grandi, mais j’en ai une de celle d’en face. C’est étrange, n’est-ce pas ? Je ne sais qui avait pris cette photo, ni pourquoi. Je la garde pour deux raisons. D’abord, j’entends encore mon père répéter inlassablement la même blague, chaque fois que nous avions des invités : “A Paris, ils ont le Moulin Rouge, nous on a le Moulin Blanc ! Il est autrement plus joli !” Et il riait. Il introduisait ainsi les discussions sur la région, comme d’autres parlent météo. Ensuite, cette image me rappelle quelle petite fille j’étais : toujours à rêvasser à la fenêtre. Moi, c’était le Moulin Rouge de Paris, qui m’intéressait. Et quand je l’ai enfin vu, à vingt ans, j’ai réalisé que mon père avait raison. »